samedi 22 octobre 2011

The Very Mad Trip (ou ma balade au Canada) / 2


Difficile de savoir quand commence le voyage. Face au mystère de la valise à faire ? Chausettes : oui. Pléiade Platon: non. Dans le RER B, qui semble à chacun de ses arrêts vous mettre au défi d'arriver à l'heure à l'aéroport? Dans l'aéroport, où votre passeport est soumis à un examen minutieux, comme s'il s'agissait d'un document émis par l'Office international du Terrorisme? En fait, le voyage commence vraiment quand on vous demande d'enlever votre ceinture: c'est une requête on ne peut plus intime qui ne débouche pourtant sur rien de très excitant. Juste ne pas sonner. Voilà. Pour voyager, il faut ne pas sonner. If you don't ring, you can fly. De quoi tournebouler le bon sens d'une mouche, mais bon. Il reste quelques contrôles, parce qu'on ne sait jamais. La multiplication des contrôles, si l'on y réfléchit bien, est flippante, à croire qu'ils doutent de la validité de leur scrutation. Enfin on décolle. Là, vous avez plusieurs possibilités, dont l'une consiste à regarder un des films proposés par le dossier du fauteuil d'en face qui se penche alors vers vous comme pour vous faire comprendre que sortir votre ordi est de l'ordre de l'impossible. Un écran tactile vous accueille, grand comme une carte de visite un peu prétentieuse. Donc : des films, hein, pas des livres – pourtant, quelques pdf bien stylés pourraient revitaliser l'appétit culturel du voyageur, mais non. Quelques minutes de Very Bad Trip 2, sans le son, s'avèrent édifiantes. Le cinéma américain a réinventé le muet par défaut. On passe quelques minutes sur Paris, de Klapish, qui a dû se mater tous les Lelouch et penser qu'un film choral est ok. Mouais. Heureusement on a encore le droit de lire et le cas Daffy, sweet Lybia, est bouclé. Enfin l'avion descend et, à sept mille pieds, sort son train d'atterrissage, on n'est jamais assez prévoyant. Il y a eu entretemps le plateau repas, qui n'était pas si mauvais, sauf que si vous vous imaginez servir ça à des amis vous revenez vite sur votre jugement un peu trop bienveillant. L'avion se couche alors sur la piste, tel un fer à repasser manipulé par un parkinsonien et là il vous faut prouver à nouveau que vous n'avez aucune intention de renverser le gouvernement ou d'importer du roquefort. Le Canada est derrière la porte vitrée, ainsi que la promesse d'une cigarette. Vous comprenez quelques secondes plus tard que le décalage horaire est un tour de passe-passe dont vous allez être et le lapin et le chapeau. Une personne du festival où vous êtes condamné vous sourit comme si elle n'avait pas lu vos livres et la découverte de l'exotisme revu et corrigé par la mondialisation peut commencer.

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